Saison 4 Ep 14 : Des copains aux Ragged Islands

Nous avons passé quelques jours aux Turques et Caïques avec Malea et Apsara. Nous sommes à présent en règle pour partir vers les Bahamas. Malea va partir directement vers Nassau, nous ne savons pas si nous les reverrons, mais qui sait où nous mènerons nos pas. Avec Apsara nous allons faire la route côte à côte vers les Ragged Islands, un des archipels du sud des Bahamas.

Traversée Caicos Hog Cay

Ce dimanche 30 mars à 11h, nous quittons enfin le lagon de Providenciales par la passe de Turtle Cove. Nous commençons par garder le solent et la grand-voile pour aller jusqu’au Nord de l’île afin de mieux sentir quel vent nous allons avoir au départ. Nous voyons plusieurs grains au radar mais nous passons devant et derrière.

Arrivés au Nord de l’île vers midi, le vent est décidément ENE, nous allons être au portant et devrons tirer des bords pour aller vers notre destination. Nous décidons d’empanner pour passer derrière avec l’espoir d’avoir moins de mer à l’abri derrière l’île. Bien nous en a pris car un énorme grain nous passera alors derrière, juste sur Malea qui a décidé de descendre plein vent arrière avec les voiles en ciseaux. Nous déroulons le Code Zéro car le vent faiblit un peu à l’abri de l’île. Ça ne durera pas longtemps car vers 13h30 le vent est remonté à plus de 25nds ce qui nous donne un vent apparent trop fort pour le code zéro et une allure plutôt engagée avec des surfs entre 12 et 15nds. Nous prendrons même un ris peu après car le vent rafale à près de 30nds. Cette combinaison de voile tranquille nous tient le reste de la journée.

Nous empannons après le dîner pour éviter le récif de Hogsty qui découvre légèrement en plein sur la route. Nous avons prévu un nouvel empannage vers minuit-1h pour ne pas rentrer dans l’île d’Ackling. Arthur et Alice ont pris le premier quart et font l’empannage avec Magali au changement de quart. Nous sommes maintenant 7 à 8MN devant Malea qui a tiré « tout droit » dos au vent. Antoine fera l’empannage suivant vers 4h30, tout seul dans un vent qui a un peu faibli. Nous remontons vers le Nord de l’immense banc « Christophe Colomb » au Sud de l’archipel que nous visons. Il n’est pas cartographié et remonte à moins de 10m de fond. Nous ne nous sentons pas d’arriver dessus sans aucune expérience, d’autant que la mer risquerait d’être forte.

La navigation en duo est un vrai avantage pour toutes ces décisions que nous pouvons partager à 4 cerveaux en discutant avec un bateau qui a une expérience différente. Au petit matin, nous décidons ensemble de relâcher le ris et nous pouvons enfin empanner vers le passage entre le banc et l’île la plus au Sud de l’archipel (little Ragged Island, la seule qui possède une petite communauté d’habitants). A 15h, nous affalons devant l’entrée du banc, au vent des îles et mettons le moteur pour les 10 derniers milles à l’abri des îles mais dans des fonds de 2 à 5m.

Les couleurs sont absolument magiques. Nous entrons dans le turquoise à perte de vue. Nous avons décidé de rentrer au moteur car nous ne sommes pas encore très à l’aise avec la navigation dans cette gigantesque piscine peu profonde dans laquelle la profondeur et les dangers se « lisent » à la couleur de l’eau ! Quelques semaines plus tard, nous n’hésiterons plus à filer 12nds sous gennaker avec encore moins de fond que ce jour-là ! C’est toujours étonnant de voir comment l’expérience nous permet de faire plus de choses.

Nous mouillons à 17h devant le « Yacht Club » de Hog Cay. Petite cahute couverte de feuilles qui sert de point de RDV aux navigateurs qui ont osé venir jusqu’ici ! Bien que le vent dehors soit encore de près de 20nds, nous sommes parfaitement abrités du vent et encore mieux des vagues. La plage qui s’étire devant nous est tout à fait « bahamatesque » : sable blond sur mer turquoise complètement calme !

Une dizaine de bateaux sont là dont Solaine, un monocoque français skippé par Jérémy et Delphine et leurs enfants : Gabriel 15 ans, Alice 13 ans et Maxime 8 ans. Nous les suivions depuis un moment pour essayer de les croiser !

La hutte des navigateurs de Hog Cay

Nous mettons l’annexe à l’eau pour aller voir cette fameuse hutte construite pour les navigateurs. Elle est meublée de tables et chaises construites ou laissées par les équipages précédents et surtout elle est décorée d’une multitude de panneaux réalisés par les bateaux qui sont passés par là. Nous retrouvons des noms de bateaux que nous avons suivis sur internet des années auparavant ! Il va falloir laisser la marque de Loela aussi.

Mardi 1er avril, ce n’est pas un poisson d’avril mais nous voyons 2 requins nager autour du bateau !!! Nous nous demandons quelle sorte c’est pour savoir la dangerosité de la baignade. Nous photographions et filmons avec la go pro et comparons avec notre livre sur les requins. Nous hésitons entre le requin des récifs inoffensif ou requin taureau agressif. Nous envoyons les photos aux bateaux voisins qui optent pour le requin « bouledogue » : on va éviter de se baigner autour du bateau l’après-midi !!!

À 16h nous nous retrouvons à la plage (affublés de poissons d’avril évidemment) avec notre matériel de peinture pour réaliser notre marque. Il faut d’abord trouver un support, Alice récupère un morceau de bois sur la plage. Et nous nous mettons tous à décorer le bois aux couleurs et décor de Loela. Chaque bateau copain fait le sien : Apsara, Solaine, Lady Grey, Sherazade, Cosmic Convergence. 14 enfants et 12 adultes ça fait plaisir de voir ça ! Alice en profite pour décorer une coque de conche avec de jolies montagnes.

Mercredi 2 avril nous allons fêter dignement nos 20 ans de mariage. Pour le déjeuner tous les bateaux se retrouvent sous la hutte pour un barbecue partagé. Le poisson en papillote de Dennie est délicieux mais nos pilons de dinde sont un peu cramés (il y a une marge de progression). Pour le dessert Martin nous a cuisiné un délicieux brownies. Nous avons aussi apportés des Marshmallow à griller sur le feu qui enchantent les enfants 😋.

Les parents discutent, les enfants jouent : c’est le bonheur. Pour digérer Magali et Delphine partent faire une petite balade à travers la végétation rase de l’île. Ça ressemble plus aux plantes méditerranéennes qu’à celles des îles tropicales. Il n’y a plus de cocotier mais des arbustes et des petits palmiers. Nous atteignons le sommet de l’île qui surplombe les criques aux eaux turquoises. Quelle belle vue !

De retour au bateau Magali se baigne rapidement pour se rafraîchir sous le regard attentif d’Antoine. Mais dès qu’on met en route le dessalinisateur les requins reviennent… à croire que la fréquence du moteur ou le rejet d’eau salée les attire. Nous ne saurons pas.

La journée se finit par un dîner de fête : foie gras du Lot, vin blanc doux de Lanzarote et gnocchis d’Italie. En dessert banane flambée au rhum. Le tout en musique de danse de salon évidemment. Martin et Mathilde nous offre une pièce de théâtre. Nous n’oublierons pas cet anniversaire 🥳

Racoon Cay

Jeudi 3 avril tous les bateaux préfèrent trouver un endroit sans requin bouledogue pour profiter de la baignade. Nous naviguons donc un peu plus au nord vers Racoon Cay. C’est encore une île déserte mais sans hutte. Dès que nous jetons l’ancre nous débarquons sur la plage en faisant le tour de l’îlet rocheux en forme de soucoupe volante. À l’ouest des îles les vagues sont toujours faibles alors ce sont les marées qui creusent la base des rochers. Nous retrouvons Apsara sur la plage : Jeux dans l’eau pour les enfants et promenade pour les parents. Tout le monde se dégourdit les jambes après une journée de voile.

Vendredi 4 avril Solaine sort le matériel de Wingfoil, Arthur est motivé pour travailler efficacement car il est autorisé à emprunter une planche et une aile quand il a fini. Jérémy lui prodigue de précieux conseils mais c’est difficile pour Arthur de retrouver ses appuis. Nous allons le chercher quand il s’éloigne trop au large et que les vagues l’empêchent de se stabiliser. Il est bien fatigué et un peu dépité d’avoir passé plus de temps dans l’eau que sur la planche … c’est dur la phase d’apprentissage. (Nous n’avons pas de photo mais Jonalyn de Lady Grey fait une maginfique aquarelle pour immortaliser l’instant)

À 15h nous allons explorer un « Blue hole » à terre. (Wikipédia nous informe : Les trous bleus se sont formés durant la période de dernière glaciation ; le niveau de l’océan était alors 130 m plus bas qu’aujourd’hui. Ils résultent de l’érosion et de la dissolution des calcaires de surface, alors exposés à l’atmosphère, via la circulation des eaux de pluie dans les diverses fractures et cassures du plateau, créant de vastes cavités souterraines. Avec le temps, les plafonds de ces cavités se sont effondrés. Les gouffres ont été noyés lors de la déglaciation (entre −21 000 et −11 000 ans), avec l’élévation du niveau des mers.) Ce sont donc de larges trous dans la roche soit sur terre soit dans la mer remplis d’eau. À quelques mètres de la plage voisine nous trouvons un sentier à travers la végétation. Nous tombons sur un large rond d’eau verte dans la roche. Les trous océaniques doivent être plus bleus. Nous tentons de lancer des cailloux dans l’eau pour évaluer la profondeur … c’est peu concluant. L’érosion a creusé aussi les abords en gruyère piquant : chaussures obligatoires.

Nous repartons vers la plage en face des bateaux car nous sommes invités à la cake party pour l’anniversaire Gabriel (l’aîné des enfants de Solaine 15 ans). Martin a fait un Broyé du Poitou à partager, un peu de notre région à l’autre bout du monde. Avec le vent les bougies ont du mal à s’allumer mais le cœur de la chorale improvisée va rattraper les choses. Quel plaisir ce petit moment entre amis.

Bien rassasié de gâteau chocolat, gâteau aux pommes et jus de fruits nous tentons la traversée de la plage à l’îlot soucoupe volante à pied. Il doit y avoir 30 cm d’eau au dessus du sable blanc. Nous pouvons facilement marcher sans trop se mouiller. Par contre l’îlot est tellement érodé que nous ne pouvons pas marcher dessus pieds nus. Nous nous contentons d’observer les lambis dont les yeux globuleux sortent de la coquille un peu comme des escargots.

Flamingo Cay

Samedi 5 avril nous voulons profiter de la marée haute de dimanche après-midi pour passer le cut (passage étroit et peu profond entre des îles) qui mènent presque directement à George Town sur l’île Great Exuma qui est supposé être le paradis pour rencontrer des navigateurs et faire des activités entre équipages, et accessoirement approvisionner un petit peu la cambuse.

Pour cela nous allons d’abord faire une étape le plus haut possible dans les Ragged Islands à Flamingo Cay. Nous faisons la route avec Apsara. Le vent est fort nous prenons 2 ris dans la grand voile et le solent déroulé en grand. Loela file vite, vent de travers, sur la mer (de travers aussi) qui est bien agitée pendant plus de la moitié du trajet car nous ne sommes plus à l’abri des îles. Heureusement, en approchant de l’arrivée, la mer s’aplatit. Nous devons mettre le moteur pour passer un banc de sable à son endroit le plus profond, presque dans l’axe du vent.

Mais juste derrière, un monocoque vire juste devant nous en se dirigeant dans la même direction. Nous reprenons notre route à la voile pour le plaisir de le doubler ! À l’arrivée, il y a déjà des bateaux sur la première baie, il n’y aura pas de place pour nos 2 bateaux, surtout que nous avons toujours besoin d’être proche d’Apsara pour capter son wifi pour nous connecter à internet via son Starlink puisque nous n’avons toujours pas de carte SIM pour les Bahamas. Nous allons mouiller tous les deux dans la coconut bay sur un joli fond de sable mais pas de cocotier à l’horizon.

Nous allons découvrir la grotte ouverte sur la mer. Nous pouvons rentrer dedans en annexe et admirer le plafond sculpté. Nous accostons ensuite sur la plage des « cocotiers ». Il semblerait qu’il y avait bien des cocotiers à une époque car il ne reste que 2 souches. Des noix de coco germées ont été plantées pour les renouveler. Dans quelques années les navigateurs repéreront mieux cette baie.

Derrière la bande de sable un grand étang saumâtre accueille une faune différente. Nous n’apercevons aucun flamand rose qui donne son nom à l’île. Nous préférons aller observer les poissons dans la mer. Ils se regroupent principalement sur les patates de corail. De nombreux poissons colorés broutent les algues tout en trouvant une cachette des prédateurs. Les enfants jouent sur le sable en faisant des pavages de coquillages.

Demain nous quitterons les Ragged Islands pour rejoindre les Exumas avec Apsara. Nous avons rencontré des bateaux-copains formidables. Arthur et Alice sont ravis d’avoir enfin rencontrés d’autres adolescents. Martin et Mathilde sont bien contents d’avoir joué en français avec des enfants. Nous nous donnons l’objectif de les retrouver dans une semaine à Georges Town quand ils remonteront à leur tour.